Peut-on négocier un accord sans délégué syndical ? C’est possible avec les “NANC”. Si le délégué syndical demeure l’acteur principal et traditionnel de la négociation en entreprise, depuis le 1er janvier 2010, de nouveaux interlocuteurs peuvent légitimement signer des accords.
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Une première brèche avait été ouverte en 2004 avec la loi sur le dialogue social.
Elle permettait, en l’absence de délégués syndicaux dans l’entreprise, de négocier des accords avec des élus ou des salariés mandatés. Cependant cette faculté devait être préalablement prévue par une convention collective étendue, ce qui explique que cette loi n’ait pas eu d’impact dans notre branche professionnelle, qui ne prévoyait pas un tel recours.
Est venue ensuite La loi du 20 août 2008 sur la démocratie sociale ; celle qui a bouleversé les règles de représentativité syndicale. Elle a supprimé cette exigence d’un accord de branche préalable. Elle a donc élargi la possibilité de conclure des accords d’entreprise en l’absence de délégués syndicaux à compter du 1er janvier 2010.
Ces nouvelles règles de négociation sont susceptibles de toucher nos collègues travaillant dans les entreprises dépourvues de délégués syndicaux. Soit parce qu’ils pourront être amenés à négocier des accords ; soit parce qu’ils seront susceptibles de nous avertir, si les règles relatives aux “NANC” n’étaient pas respectées…
De nouvelles règles du jeu…
Il faut donc savoir que :
• les élus peuvent désormais négocier des accords d’entreprise, mais uniquement si l’effectif est inférieur à 200 salariés (art. L.2232-21) ;
• lorsqu’il n’y a aucun représentant élu, et qu’un procès-verbal de carence a été établi, la négociation est possible avec un salarié mandaté par une organisation syndicale représentative dans la branche (art. L. 2232-24) ;
• l’employeur doit informer les organisations syndicales représentatives dans la branche dont relève l’entreprise de sa décision d’engager des négociations avec les élus, ou avec des salariés mandatés. La négociation ne peut concerner que les mesures dont la mise en oeuvre est subordonnée par la loi à un accord collectif (durée temps de travail par exemple), à l’exception des accords mentionnés à l’article L. 1233-21 (accord de méthode) ;
• le représentant de la section syndicale, nouveau mandat créé par la loi d’août 2008, peut aussi faire partie du jeu, quoiqu’en principe, son mandat ne lui permette pas de négocier des accords. Cependant l’article L. 2143-23 prévoit à titre exceptionnel qu’il peut négocier un
accord – uniquement dans les entreprises de plus de 200 salariés –, qui ont des élus mais qui ont eu un PV de carence au premier tour des élections (et donc n’ont aucun délégué syndical). L’organisation syndicale qui le désigne doit alors préciser qu’il a bien le pouvoir de négocier un accord d’entreprise. En revanche, les thèmes de négociation ne sont pas limités, contrairement aux élus ou aux salariés mandatés.
Pour autant, il ne suffit pas d’avoir l’interlocuteur légitime. Encore faut-il que les conditions de validité des accords soient respectées. Et elles diffèrent selon l’interlocuteur…
Redoubler de prudence !
Pour les accords négociés avec les élus, la validité est subordonnée à la conclusion par les titulaires représentant la majorité des suffrages exprimés lors des dernières élections professionnelles, et à l’approbation par la commission paritaire de branche qui contrôle que l’accord respecte les dispositions législatives ou conventionnelles applicables. À défaut de réponse dans les 4 mois, l’accord est réputé valide.
Pour les accords négociés avec un salarié mandaté ou avec le représentant de la section syndicale, une approbation par référendum à la majorité des suffrages exprimés exprimés est nécessaire.
Il convient de rappeler que le code (Article L 2232-27-1) rappelle le respect des règles générales de négociation : l’indépendance des négociateurs vis-à-vis de l’employeur, l’élaboration conjointe du projet d’accord, la concertation avec les salariés, et la faculté de prendre attache des organisations syndicales représentatives de la branche…
Sans être alarmiste, il est à craindre que certains de ces “NANC” seront amenés à signer des accords a minima, voire désavantageux pour les salariés, puisque la loi permet malheureusement de signer des accords en dessous des dispositions des conventions collectives. Les salariés “en place” auront donc tout intérêt à être vigilants !!!
Isabelle Leminbach