Par Michel de La Force
La « génération Y » regroupe les jeunes hommes et les jeunes femmes nés dans les années 1980. Selon le quotidien Libération (32/03/09), 20 % de la population active employée a moins de 30 ans. Ces jeunes arrivent sur un marché du travail tendu, en pleine recomposition. Comment s’intègrent-ils dans l’entreprise ? Comment le management peut-il les aider à trouver leur place ? En quoi le syndicalisme cadres peut-il répondre aux attentes de cette génération ?
Les managers nés entre 1945 et 1965 s’en plaignent : le courant ne passe plus avec cette « génération Y » formée de jeunes de 15 à 30 ans. Quels sont les principaux points de friction entre les générations ? Pour Daniel Ollivier, directeur associé d’un cabinet de conseil en management, et Catherine Tanguy, coach d’entreprise, tout manager doit « étudier, comprendre et intégrer sept éléments de différenciation » :
• Dans l’entreprise, les jeunes salariés estiment avoir des droits plutôt que des devoirs.
• Ils zappent entre vie privée et vie professionnelle.
• Ils sont dans la dictature de l’instant.
• Ils « sont là sans être là », tout en étant capables de faire plusieurs choses à la fois.
• S’ils traitent d’égal à égal avec tout un chacun, y compris avec la direction, ils ont des exigences redoutables en matière de reconnaissance.
• Ayant intégré qu’ils vivraient plusieurs carrières, ils sont, sans complexes, « infidèles » à leur employeur.
• Ils sont curieux et ont le goût d’apprendre. Mais la théorie pure les effraie et ils préfèrent des méthodes privilégiant l’action.
Savoir gérer les paradoxes
Face à ces réalités, que faire ? Utiliser les éléments de différenciation pour motiver ses jeunes recrues et faire passer les messages de la direction. L’encadrement intermédiaire doit trouver l’équilibre entre :
• court et moyen terme,
• contrôle et responsabilisation,
• stabilisation et changement,
• productivité et qualité,
• enfin, entre individualisation et esprit d’équipe.
Il y parviendra en mettant à profit ses aptitudes de manager : « écoute active, clarté des règles du jeu, capacité à négocier sur une logique gagnant-gagnant ».
« La concertation et la responsabilisation individuelle sont des registres à privilégier dans le management de la génération Y ». Le manager s’appuiera sur les motivations et les valeurs du jeune salarié pour lui faire admettre le bien-fondé d’une règle aussi simple que… la ponctualité. Il ne s’agit en effet plus de donner des ordres, mais « de donner un cap, de choisir les jalons et les indicateurs garants du résultat de création de valeur ».
Être à l’écoute, former, innover
A chaque étape du parcours dans l’entreprise, le manager aura la volonté :
• d’être crédible et authentique,
• de créer un climat de coopération,
• d’établir un contact de qualité.
« Placer le curseur au bon niveau » lui permettra de « donner du sens et de la valeur aux exigences qui paraissent indispensables pour garantir une compétitivité élevée ». Ce faisant, « l’excellence managériale dont auront été capables de faire preuve les managers des Y sera profitable à tous les collaborateurs, jeunes et vieux ». Une excellence, rappellent les auteurs, qui « repose sur la capacité à revisiter ses croyances, à choisir en conscience les postures du management les plus adaptées et à transmettre son enthousiasme ».
Au contact permanent des réalités sociétales, la FIECI prend soin de rester en phase avec les tendances les plus pointues du management : une simple évidence, pour mieux comprendre les préoccupations de ses adhérents. Les professions qu’elle regroupe ont d’ores et déjà compris toutes les qualités de cette « génération Y », turbulente, paradoxale mais compétente et dynamique.
Face aux réticences de nombreux acteurs de la société civile, notre fédération apparaît comme un médiateur idéal, capable d’aplanir les incompréhensions réciproques et d’enrichir les relations intergénérationnelles. Elle préfigure le monde de demain dans la mesure où elle privilégie, en son sein et dans l’entreprise, l’innovation, l’écoute et le respect.
Génération Y, mode d’emploi – Comment intégrer les jeunes dans l’entreprise, par Daniel Olivier et Catherine Tanguy, Éditions De Boeck, 215 p., 19,50 €.
EXTRAITS :
Conflit de valeurs ou simple question de protocole ? « Ces jeunes, une fois entrés dans l’entreprise, estiment qu’ils peuvent exiger d’avoir des réponses adaptées à leurs droits dans le domaine de la législation sociale, l’information, la formation, mais aussi sur le plan de la qualité de l’ambiance.
Évidemment, cette attitude de consommateur n’est pas bien vécue par des managers dont les valeurs essentielles tournent autour du mérite et du sens de l’effort. Comment est-il possible d’exiger sans avoir préalablement fourni la preuve de sa valeur ? L’ingratitude est souvent évoquée par des supérieurs hiérarchiques qui éprouvent le désagréable sentiment que le pouvoir s’inverse.
Les jeunes sont à l’intérieur de l’entreprise ce qu’ils sont à l’extérieur. Ils revendiquent le droit d’être eux-mêmes et cette attitude s’avère parfois sulfureuse parce que la manière de dire les choses ne tient pas compte des conventions. »
Apprendre en faisant – « Les jeunes Y sont complètement en phase avec les attentes de l’entreprise. La vitesse du changement et la recherche de la performance individuelle ne leur posent aucun problème, bien au contraire. Ils accordent beaucoup de valeur au développement de leurs compétences et ils ont totalement conscience qu’il leur faudra apprendre toute leur vie professionnelle. Ils ont compris qu’ils devaient être les responsables de leur propre ressource humaine. […] Pour les jeunes, il y a aujourd’hui inadéquation entre la formation proposée en entreprise (trop statique) et les modalités d’acquisition d’une compétence. Ils apprécient la diversité des modes d’apprentissage : autoformation, visite, stage sur le terrain, parrainage. Ils ne comprennent pas cette ligne de démarcation entre travail et formation : l’interaction entre les deux leur semble tellement évidente ! L’entreprise doit être apprenante. Ils sont en attente d’une démarche de formation en relation directe avec la réalité du terrain. Des actions qui prennent appui sur les situations professionnelles. »
Le principe de réalité – « Les jeunes de la génération Y disposent de talents et de potentialités qui sont une chance formidable pour nos entreprises… si la greffe prend. Ils sont à l’image de leur époque, parfaitement intégrés dans ce monde d’incertitude aux environnements flous. […] Il est intéressant de mettre l’accent sur trois caractéristiques qui sont au cœur des besoins actuels de l’entreprise :
• Une capacité à être à l’aise dans le changement et à savoir remettre en cause l’existant avec la volonté pragmatique d’agir efficacement : ils n’ont ni des chaussures de plomb ni une vision poétique des évolutions à mettre en place ;
• Une réactivité très forte par rapport aux événements : ils savent s’adapter et être le petit hors-bord qui sait prendre la vague au bon moment plutôt que le paquebot victime de sa force d’inertie ;
• Une capacité inventive à construire une nouvelle manière de faire et à savoir se débrouiller avec les moyens dont ils disposent : le fait de sortir des sentiers battus et en même temps de savoir faire simple forme une combinaison appréciable. »
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