Publié le 6 août 2008.
Les grandes SSII européennes comme Capgemini ou AtosOrigin ne souhaitent plus augmenter leurs effectifs sur le Vieux Continent.
Un virage historique difficile à accepter pour les salariés.
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Les grandes SSII européennes sont en train de changer de visage. De plus en plus tentées par lesdélocalisations dans lespays à bas coûts (« offshore » dans le jargon des experts), elles multiplient les recrutements en Inde, auMaghreb, ou dans les pays de l’Est.Revers de lamédaille, elles lèvent le pied en Europe de l’Ouest. La semaine dernière, Capgemini a indiqué que ses effectifs étaient restés quasi stables enOccident aupremier semestre alors qu’ils ont progressé de 13,8% dans les pays émergents. Stratégie identique chez Atos Origin. « L’accroissement net de nos effectifs sera quasi nul en Europe de l’Ouest dans les années à venir », expliquait le président du directoire, PhilippeGermond, lors de l’assemblée générale en juin.
Très présent en Inde depuis l’achat deXansa l’an dernier, Steria va conserver un nombre de salariés stable ou en léger retrait en Grande-Bretagne. En France et en Allemagne, les effectifs pourraient augmenter dans le conseil mais pas dans l’intégration de systèmes, selon nos informations. Cette stratégie ne fait toutefois pas l’unanimité. Sopra prévoit ainsi d’accroître le nombre deses salariéseuropéensdans les années à venir. Pour beaucoup, les services de proximité comme le conseil ou l’assistance technique devraient rester en Europe, mais les prestations de maintenance ou d’intégration de systèmes sont soumises à de fortes pressions.
Pour travailler avec l’Inde, les SSII se sont aussi réorganisées. Début 2007,AtosOrigin a transformé ce pays en un centre de services travaillant à prix coûtant pour les autres filiales de la SSII. Un modèle utilisé par Accenture, Logica, ou encore IBM. « Ces centres de services ne génèrent pas de profits. Ils sont mesurés sur leur capacité à tenir les délais et à assurer une qualité de service », expliquait récemment Fabrice Dersy, directeur externalisation chez Accenture France.
Gigantesque basculement
Pour forcer les managers occidentaux à utiliser des ressources indiennes, Capgemini est allé encore plus loin. La SSII a affecté des salariés indiens aux résultats d’exploitation de certaines unités.
C’est le cas par exemple de la division télécoms media en France ou des activités intégration de systèmes enGrande-Bretagne et aux Etats-Unis. « Il est assez facile de réaliser de 20% à 30%d’un projet informatique en Inde via un modèle classique de sous-traitance. Au-delà, il est nécessaire de partager la gestion du projet », explique Pierre-Yves Cros, directeur de la stratégie chez Capgemini.
Ce gigantesque basculement vers l’offshore nécessite une forte croissance des volumes d’activité pour éviter toute érosion de revenus. Selon Capgemini, il faut en effet vendre les prestations de quatre informaticiens indiens pour obtenir le chiffre d’affaires d’un ingénieur européen. Rapide, cette mutation suscite enfin de fortes réticences au sein des SSII. « Aujourd’hui, il faut être capable de justifier son salaire à une échelle mondiale, soupire un professionnel du secteur.
Et lorsque vous rencontrez des gens avides de réussite et tout aussi compétents que vous, qui sont payés cinq fois moins cher, c’est assez effrayant. »
EMMANUEL GRASLAND – Les Echos
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