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Quels scénarios après l’adoption de la réforme des retraites ?

Lundi, après le rejet des motions de censure par le Parlement, le projet de réforme des retraites a été officiellement adopté. Conseil constitutionnel, RIP, manifestations… A quoi peut-on désormais s’attendre ?

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Publié le 21 mars 2023 à 20h59, modifié le 22 mars 2023 à 15h17

Temps de Lecture 4 min.

Des manifestants contre la réforme des retraites bloquent le tramway à Montpellier, mardi 21 mars 2023.

Depuis lundi 20 mars, le projet de réforme des retraites est considéré comme adopté, après le rejet des deux motions de censure déposées contre le gouvernement à la suite de son recours à l’article 49.3 de la Constitution pour faire passer le texte.

Depuis, les opposants à la réforme ont lancé plusieurs initiatives : saisines du Conseil constitutionnel, demande de référendum d’initiative partagée (RIP), appels à la mobilisation… Alors que la loi n’a pas encore été promulguée par Emmanuel Macron, voici les différents scénarios possibles pour les jours et semaines à venir.

L’intensification des manifestations

Les syndicats ont fait savoir leur détermination à poursuivre leur bras de fer avec le gouvernement. Ainsi, la CGT a appelé à « amplifier les mobilisations » et à « participer massivement aux grèves reconductibles et aux manifestations » prévues jeudi 23 mars, « et après, si nécessaire ». Des rassemblements spontanés ont également eu lieu dans plusieurs villes de France lundi soir, notamment à Paris, où au moins 234 personnes ont été interpellées après des heurts entre manifestants et forces de l’ordre.

Le « scénario CPE » (contrat de première embauche) de 2006 est souvent évoqué par les opposants à la réforme des retraites, et encore davantage depuis le recours à l’article 49.3 de la Constitution. Cette loi, qui créait un CDI spécial jeunes avec une période d’essai de deux ans, avait été adoptée elle aussi avec l’utilisation du 49.3 par le premier ministre Dominique de Villepin, puis promulguée. Mais elle avait été suspendue et supprimée par un nouveau vote, en réponse à une situation d’extrême tension sociale et de très forte contestation.

A l’heure actuelle, si des actions de syndicats d’étudiants ont bien eu lieu depuis le début de la mobilisation contre la réforme des retraites, aucune n’a débouché sur un véritable mouvement de masse de la part des jeunes.

Lire l’analyse : Article réservé à nos abonnés Réforme des retraites : la jeunesse étudiante hésitante sur la mobilisation

Les saisines du Conseil constitutionnel

Les services de la première ministre, Elisabeth Borne, ont annoncé lundi soir qu’elle allait saisir directement le Conseil constitutionnel pour un examen « dans les meilleurs délais » du texte. Le Rassemblement national et la Nouvelle Union populaire écologique et sociale (Nupes) ont également déposé deux recours. Pour se prononcer sur la conformité du projet de réforme des retraites, le Conseil constitutionnel dispose d’un mois, ou de huit jours, si le gouvernement lui demande un examen en urgence. Sa saisine suspend la promulgation de la loi.

Selon l’opposition, le gouvernement a utilisé un véhicule législatif qui n’est pas adapté pour la réforme des retraites, à savoir un projet de loi de financement rectificative de la Sécurité sociale (PLFRSS), qui permet de rectifier en cours d’année le budget de la Sécurité sociale. A leur sens, certains articles du texte de la réforme ne concernent ni les finances, ni le budget de la Sécurité sociale.

Interrogé par Le Monde, Jean-Philippe Derosier, constitutionnaliste et professeur de droit public à l’université de Lille, relevait :

« Il y a une interrogation sur la constitutionnalité d’emprunter ce véhicule pour faire la réforme des retraites. »

Les opposants s’appuient également sur l’avis du Conseil d’Etat qui, dans une note confidentielle, avait déjà alerté le gouvernement d’un risque d’inconstitutionnalité de certaines mesures de son projet de réforme, comme le révélait Le Monde le 22 février.

Le référendum d’initiative partagée

Quelque 250 parlementaires, députés et sénateurs principalement de gauche, ont soumis lundi une demande de référendum d’initiative partagée (RIP) au Conseil constitutionnel, qui va d’abord en examiner la recevabilité. Le Conseil constitutionnel a un mois pour vérifier entre autres qu’il n’a pas pour objet l’abrogation d’une disposition législative promulguée depuis moins d’un an.

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Si le Conseil confirme que le texte est recevable, s’ouvre alors une période de neuf mois au cours de laquelle vont être recueillies les signatures des citoyens. La proposition de loi doit obtenir le soutien d’au moins 10 % des électeurs inscrits sur les listes électorales, soit 4,87 millions de signatures.

Puis le Parlement a six mois pour examiner la proposition de loi. S’il ne le fait pas, le président de la République doit la soumettre au référendum.

Depuis son adoption en 2008, aucun RIP n’a encore abouti. Une demande avait été lancée en 2020 pour contester la privatisation des aéroports de Paris, mais le Conseil constitutionnel avait constaté que le seuil nécessaire du nombre de signatures n’avait pas été atteint.

Une dissolution de l’Assemblée nationale exclue

Emmanuel Macron a affirmé mardi qu’il n’entendait ni dissoudre l’Assemblée nationale, ni remanier le gouvernement, ni convoquer un référendum sur sa réforme des retraites pour éteindre la contestation, ont rapporté à l’AFP des participants à une réunion du camp présidentiel à l’Elysée.

Selon les informations de BFM-TV, la dissolution de l’Assemblée a pourtant été une menace brandie par le président, jeudi 16 mars. Ce jour-là, le gouvernement a finalement choisi de ne pas soumettre la réforme des retraites au vote et a recouru à l’article 49.3.

Le président est le seul à pouvoir dissoudre l’Assemblée nationale, selon l’article 12 de la Constitution. Concrètement, cela entraînerait la fin du mandat de tous les députés et l’organisation de nouvelles élections législatives. Il s’agit d’une arme à laquelle le président peut avoir recours en cas de crise ou de blocage institutionnel en cours ou à venir.

Depuis 1958, cinq dissolutions de l’Assemblée nationale ont eu lieu : en 1962 et 1968 par Charles de Gaulle, en 1981 et 1988 par François Mitterrand, et en 1997 par Jacques Chirac.

Le remaniement du gouvernement

Après le rejet de justesse des motions de censure à l’Assemblée nationale, lundi, le gouvernement apparaît fragilisé et en sursis.

Si le chef de l’Etat se refuse, dans l’immédiat, à modifier son équipe gouvernementale, il se ménage cette option en cas d’aggravation de la crise. Parmi les armes constitutionnelles entre ses mains, celle du remaniement reste la moins périlleuse pour le chef de l’Etat. La crise politique ouverte par le 49.3 lui offrirait même un prétexte pour donner un nouveau souffle à un quinquennat en manque d’oxygène.

La promulgation de la loi par Emmanuel Macron

Bien que la réforme des retraites soit réputée adoptée après le rejet des deux motions de censure, elle n’a pas encore été promulguée par le président.

Dans une tribune au Monde, un collectif de membres du Pacte du pouvoir de vivre, parmi lesquels Laurent Berger (CFDT), Marie-Aleth Grard (ATD Quart Monde), Christophe Robert (Fondation Abbé-Pierre) et Najat Vallaud-Belkacem (France Terre d’asile), appelle Emmanuel Macron à ne pas promulguer la loi, afin de ne pas laisser la violence gagner la société.

« Toutes les énergies seront nécessaires tant qu’elles ne sont pas guidées par la colère et le ressentiment. Aussi l’heure est à l’apaisement et à la responsabilité. »

D’autres voix se sont élevées dans le même sens, notamment au sein du groupe de députés Liberté, indépendants, outre-mer et territoires (LIOT), à l’origine d’une des motions de censure. Le député François Ruffin (La France insoumise) a lui aussi appelé le chef de l’Etat à « l’apaisement du pays » en décidant de « ne pas promulguer » la réforme des retraites.

Invité de Sud Radio, mardi, le ministre du travail, Olivier Dussopt, a confirmé qu’une fois promulguée la loi devait entrer en vigueur au 1er septembre 2023.

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