DOSSIER. Réforme des retraites : "Créer le bordel", article 40... Comment Macron et la majorité comptent éviter un nouveau débat

  • Emmanuel Macron veut à tout prix éviter un nouveau débat sur les retraites.
    Emmanuel Macron veut à tout prix éviter un nouveau débat sur les retraites. POOL / AFP - BENOIT TESSIER
Publié le , mis à jour

l'essentiel Avec sa proposition de loi (PPL) visant à rétablir l'âge légal de départ à la retraite à 62 ans qui sera examinée en commission mardi, le groupe LIOT met la majorité en grande difficulté. Celle-ci joue donc avec le règlement de l'Assemblée pour éviter le débat.

« Franchement, de quoi parle-t-on ? D'une niche LIOT ! Sérieusement ! La vérité c’est que les Français n'en ont rien à foutre »... Comme ses collègues, ce député Horizons tente de convaincre un petit groupe de journalistes qu'il n'y a pas de quoi faire tout un plat de la proposition de loi visant à abroger la réforme des retraites. Mais ses critiques trahissent une certaine fébrilité. Le groupe Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires a déposé, dans le cadre de sa niche parlementaire du 8 juin prochain, un texte qui sera examiné mercredi en commission des affaires sociales.

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Son article premier visant à ramener l'âge légal de départ à la retraite à 62 ans affole l’Élysée qui craint qu'il ne soit voté. Le texte est, en effet, soutenu par l’ensemble des oppositions de la Nupes au RN en passant par une partie des LR. « Si on gagne le vote, la réforme des retraites de Macron devient totalement illégitime et c'est la reprise immédiate des manifs. L'intersyndicale sera elle-même débordée », prédisait mardi un leader socialiste.

"Faire respecter la constitution"

Il a donc été demandé à la majorité de tout mettre en œuvre pour que le texte de LIOT ne puisse pas être examiné en séance. Un argument plaide dans ce sens : la PPL contreviendrait à l’article 40 de la constitution qui stipule qu'une proposition de loi ne doit pas engager de dépenses  supplémentaires.

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« On ne va pas l'examiner parce que la constitution le dit et si certains ne sont pas d'accord qu'ils renversent le gouvernement », éructe donc notre député Horizons. Plus calmement, un de ses collègues de Renaissance nous assure : « dans un climat général de remise en question des institutions on doit être très fermes ». Et le rapporteur général du Budget, Jean-René Cazeneuve de confier à La Dépêche : « Nous sommes dans une situation particulièrement grave. Il y a aujourd’hui un large consensus pour dire que l'article 1 de la PPL ne respecte pas l’article 40 mais nous faisons face à des difficultés pour faire respecter la constitution au sein de l'Assemblée Nationale. Un comble... »

Pour comprendre, quelques explications (tortueuses) s'imposent. Mardi, la présidente de la Commission des Affaires sociales a saisi, comme l'article 89.4 du règlement de l'Assemblée le lui permet, son homologue de la commission des finances afin qu'il déclare le texte irrecevable. Problème, ce dernier n'est autre que l'Insoumis Eric Coquerel qui entend bien valider la proposition de loi. Afin de le contourner, certains dans la majorité aimeraient qu’entre en jeu le macroniste Jean-René Cazeneuve. En effet, l’article 89.4 stipule que le rapporteur du budget peut être, lui aussi, saisi mais cela ne s'est jamais produit.

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« Une partie de la majorité veut créer le bordel pour empêcher Coquerel de décider », nous expliquait, hier, un conseiller de la majorité qui s’inquiétait que les oppositions puissent ainsi saisir le Conseil constitutionnel. Un membre du groupe socialiste alertait, en effet, la veille la Dépêche : « si le texte n’est pas étudié dans l'hémicycle nous riposterons juridiquement ».

Une autre option s'offre à la majorité qui est de déclarer irrecevable l'article 1 dès le début des débats en séance mais ce scénario ayant fuité dans la presse il devient, lui aussi, très fragile.

L’épisode des retraites est donc loin d'être clos. D'autant que si le texte est finalement examiné en séance, il a de fortes chances d'être voté. S'ouvrirait ainsi un nouveau débat au Sénat puis à nouveau à l'Assemblée. Le cauchemar de l’Élysée.

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Les commentaires (37)
François Madoré Il y a 11 mois Le 26/05/2023 à 18:08

La Dépèche, que ne ne qualifierai de journal gauchiste révolutionnaire, nous explique que l'idée de voir le parlement voter sur un texte concernant tous les français est le "cauchemar de l'Elysée".

Et c'est vrai.

Cela devrait peut-être interpeler tout citoyen quant à l'état de notre démocratie.

baloo Il y a 11 mois Le 26/05/2023 à 17:07

Voilà donc la dénommée (à tort...) "majorité présidentielle" réduite à utiliser des man½uvres dilatoires et indignes, qu'elle reprochait naguère à la NUPES d'user et abuser... Cela en dit (très) long sur le sens de l'Etat et responsabilités de ces groupes de députés soutenant Macron. C'est parfaitement éc½urant et ce n'est pas comme ça que le blason de la politique va retrouver du lustre. De toute façon, en définitive on le sait depuis bien longtemps: la dénommée "majorité parlementaire" du président n'a PAS de politique, pas de ligne, pas de projet - ne parlons même pas d'idéal, mot et notion qui leur sont inconnus... Tout vient d'en haut, au fil des lubies du chef, des caprices de Macron qui est dans une impuissance pathétique... La seule solution est son départ, sans doute...

PAPY1946 Il y a 11 mois Le 26/05/2023 à 16:51

la réforme des retraites de MACRON ne concerne pas les retraites mais doit servir au remboursement de la dette organisée par MACRON. Si la Loi présenté par LIOT est votée, comment MACRON va rembourser sa dette !!! qu'il rétabisse "l'impot sur la fortune" mais, là, on ne touche pas aux riches.......