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Retraites: ferme sur ses lignes rouges, l'intersyndicale entend maintenir la pression à Matignon

Les représentants des organisations syndicales vont rencontrer Élisabeth Borne à Matignon ce mercredi. Avec une revendication claire: le retrait de la réforme des retraites.

Ils ne s'étaient pas vus depuis la présentation du projet du gouvernement en janvier. Ce mercredi, Élisabeth Borne reçoit dans un geste "d'apaisement" les syndicats pour tenter de sortir de la crise des retraites. Plus facile à dire qu'à faire: depuis le début de mouvement social, les organisations syndicales ne réclament rien d'autre que le "retrait" de la réforme.

La Première ministre a promis qu'elle serait "à l'écoute de tous les sujets" que les syndicats voudraient aborder lors de cette rencontre qui débutera à 10 heures à Matignon, en dépit de "points de désaccord" sur la réforme des retraites, en particulier le recul de l'âge de départ de 62 à 64 ans.

De leur côté, les syndicats ont déjà prévenu: si l'exécutif refuse de parler des 64 ans, "on partira", avait indiqué le leader de la CFDT, Laurent Berger. Même son de cloche du côté de la nouvelle patronne de la CGT, Sophie Binet, qui aura a cœur de montrer sa détermination pour son baptême du feu à la tête de l'organisation contestataire. En cas de refus d'Elisabeth Borne de retirer son texte, "le rendez-vous risque d'être très rapide", a fait savoir la syndicaliste qui assure que la sortie de crise ne peut passer que par un retrait.

"Le gouvernement qui veut tourner la page va voir qu'on ne veut pas tourner la page", a encore affirmé un leader syndical, à l'issue d'une réunion mardi de l'intersyndicale.

"Impasse"

D'un côté comme de l'autre, on se fait peu d'illusion sur le résultat de ce rendez-vous à Matignon. La rencontre avec Élisabeth Borne "est déjà écrite", estime un ministre de premier plan, qui table sur une impasse. Auprès de BFM Business, un responsable syndical plante le décor.

"C'est un peu comme si vous aviez joué à la belote avec votre voisin, que vous vous étiez aperçu qu'il avait triché et qu'il vous proposait de rejouer".

A la veille d'une 11e journée de mobilisation et à une semaine du verdict du Conseil constitutionnel, tous s'attendent à une ambiance tendue entre la Première ministre et les représentants de l'intersyndicale. D'autant que ces derniers comptent bien ne parler que du recul de l'âge de départ à la retraite et refusent d'aborder d'autres sujets.

Manque de chance pour le gouvernement dont le souhait est de "négocier autre chose" que les retraites, selon un ministre. Élisabeth Borne insiste elle-même sur le fait qu'il y a "beaucoup de sujets à aborder" sur "la qualité de vie au travail, sur les fins de carrière, sur la prévention de la pénibilité".

"La pénibilité au travail, les carrières longues ou l'emploi des seniors, ce sont des sujets importants, mais ce n'est pas la priorité pour le moment", a rétorqué François Hommeril, président de la CFE-CGC.

Exercice de communication

Dans ces conditions, les discussions risquent de tourner court et se solder par un nouveau constat de désaccord. Mais pour les deux camps, cette réunion est aussi un exercice de communication. Pour l'exécutif, il s'agit de montrer que la porte reste ouverte aux syndicats, que le dialogue est toujours possible. L'intersyndicale, qui s'est réunie mardi pour préparer ce rendez-vous avec la Première ministre et parler d'une même voix à l'issue, entend pour sa part montrer qu'elle n'est pas prête de se fracturer comme certains pouvaient le redouter.

"L'intersyndicale est bien unie, soudée. C'est rassurant, rien n'a changé" depuis le remplacement de Philippe Martinez à la tête de la CGT, a fait valoir un responsable syndical mardi.

Une autre source syndicale balaie d'ailleurs les récentes dissonances entre la CFDT, qui réclame de "retirer ou suspendre" le texte, et la CGT, qui veut le "retrait" pur et simple: "en réalité parler de suspension, c'est comme pour le CPE (Contrat première embauche), c'est ne pas appliquer". Outre le retrait de la réforme, la CFDT devrait toutefois réclamer une conférence sociale sur le travail et les retraites, selon son secrétaire national Yvan Ricordeau.

Paul Louis, Caroline Morisseau avec AFP