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Gouvernement

Élisabeth Borne présente ce mercredi la feuille de route des "100 jours" de l'exécutif

La Première ministre doit poser des jalons, après qu'Emmanuel Macron a fixé plusieurs priorités, dont le "travail", "l'ordre" et "le progrès". Privée de majorité absolue et fragilisée par une réforme des retraites qui suscite toujours les contestations, elle entreprend une mission très compliquée. Son destin dépendra de sa réussite.

Jour J pour Élisabeth Borne. La Première ministre dévoile ce mercredi la feuille de route du gouvernement, censée donner une consistance à la période de "100 jours d'apaisement", annoncée par Emmanuel Macron lors de son allocution télévisée le 17 avril dernier.

L'hôte de Matignon présentera son plan de bataille depuis l'Élysée, après un Conseil des ministres où elle précisera le contenu du programme gouvernemental des semaines à venir. Elle fera ensuite le service après-vente ce jeudi lors d'une interview prévue en début de matinée sur France 2.

Comment tourner la page des retraites?

À l'image du président de la République, Élisabeth Borne cherchera à démontrer que l'exécutif est à la tâche, en capacité d'apporter des réponses concrètes aux Français et non entravé par sa très impopulaire réforme des retraites.

Une mission ô combien difficile, comme en attestent les déplacements d'Emmanuel Macron ces derniers jours. Aussi bien en Alsace que dans l'Hérault ou le Loir-et-Cher, des manifestants ont réservé des concerts de casseroles au chef de l'État. Plusieurs ministres ont eu le droit à des accueils similaires.

Le camp présidentiel riposte et oppose notamment la France du "travail" à celle des "casseroles", à l'image de Gabriel Attal ou François Patriat. Mais la difficulté est bien là, le sujet des retraites paraissant toujours à l'agenda. La Première ministre peut-elle réellement clore le chapitre?

Manifestation du 1er-Mai, seconde demande de référendum d'initiative partagée (RIP), proposition de loi du groupe Libertés indépendants outre-mer et territoires (Liot) pour abroger la mesure du report de l'âge légal: les initiatives pour continuer à contester la réforme sont nombreuses.

Comment parvenir à des accords?

Et Élisabeth Borne fait toujours face au même problème: comment gouverner sans majorité relative à l'Assemblée nationale? Et cela alors que la Première ministre s'est engagée à ne plus employer le 49.3 - déjà utilisé à 11 reprises depuis le début de la nouvelle législature - en dehors des textes budgétaires.

Une part de l'équation politique se trouve chez le parti Les Républicains (LR). La droite et ses 62 députés font office de groupe pivot. Ils ont permis l'adoption de plusieurs textes de l'exécutif comme ceux sur le pouvoir d'achat ou l'assurance-chômage. Mais leurs divisions sur les retraites ont empêché le gouvernement de s'assurer le soutien escompté, faute duquel Élisabeth Borne a déclenché le 49.3, fragilisant un peu plus sa situation et celle du camp présidentiel.

Certains marcheurs veulent regarder de l'autre côté de l'hémicycle. Le ministre des Transports Clément Beaune a appelé la majorité à travailler avec la "gauche modérée", dans un entretien pour Libération, tout en soulignant que "LR n'est pas une force politique stable".

Là aussi, l'entreprise n'est pas évidente, tant la gauche s'est résolument opposée à l'exécutif à l'Assemblée nationale. Seul exemple notable: la loi sur l'accélération des énergies renouvelables sur laquelle la macronie avait obtenu les voix des socialistes.

La Première ministre devrait poursuivre avec la même méthode, consistant à trouver des accords texte par texte et non à "élargir la majorité", une mission qui lui avait été confiée par Emmanuel Macron mais dont elle reconnaissait implicitement l'impossibilité dans un entretien accordé au Point, au Monde et à RTL.

"Travail, justice et progrès"

Dans son adresse aux Français le 17 avril dernier, Emmanuel Macron a évoqué trois chantiers prioritaires: le "travail", la "justice et l'ordre républicain et démocratique" ainsi que le "progrès". Depuis cette intervention, il a également livré quelques pistes de calendrier et de méthode.

Sur le volet travail, le locataire de l'Élysée a évoqué un texte de loi transposant "très vite" l'accord national interprofessionnel sur le "partage de la valeur" en entreprise, conclu entre les organisations patronales et syndicales.

Il a également cité un projet "sur France Travail (transformation de Pôle Emploi, ndlr) et sur les lycées professionnels, sur lesquels on doit avancer d'ici l'été" et qui sera porté par le ministre Olivier Dussopt.

Selon des sources gouvernementales et parlementaires, Élisabeth Borne devrait également tracer les contours d'une future loi sur le numérique comprenant la mise en place d'un "filtre anti-arnaque", la transcription en droit français des nouveaux règlements européens sur les services et marchés numériques (DSA-DMA), ou encore un "renforcement" du blocage des sites pornographiques à destination des mineurs.

Sur le volet immigration, Emmanuel Macron a prôné "un seul texte" pour "durcir nos règles" en matière d'expulsion tout en améliorant l'intégration. Écartant ainsi l'hypothèse d'un projet découpé en plusieurs textes pour faciliter son adoption, comme il l'avait lui-même évoquée il y a un mois. Mais "je ne sais pas vous dire quel sera le chemin. Il faut construire une majorité politique", a-t-il dit dans un entretien au Parisien.

Un bilan prévu pour le 14 juillet

Pour Élisabeth Borne, il sera difficile de trouver un accord sur le texte, alors que gauche comme droite se sont montrées critiques envers ce projet de loi. Mais l'exécutif pourrait aussi choisir de contourner l'obstacle des projets de loi, en dévoilant également des mesures réglementaires. La Première ministre en a esquissé la voie, en annonçant par exemple la semaine dernière la division par deux du délai d'obtention de titres d'identité.

Quoi qu'il arrive, elle joue une partie de son destin ces prochains mois. La période des "100 jours" se terminera le 14 juillet. À cette date, un premier bilan sera fait. Ses conclusions seront déterminantes pour l'avenir d'Élisabeth Borne à Matignon.

Baptiste Farge avec AFP